6 novembre 2022, trois mois plus tard, les souvenirs sont intactes pour les deux artisans tricolores. Véritable binôme de réflexion, les deux sélectionneurs ont vécu les mondiaux de Prague au plus près des joueurs.
Ils nous partagent leurs souvenirs.
Guillaume, Jimmy, merci de nous consacrer votre temps pour ce retour sur les mondiaux.
Quand êtes-vous arrivés à Prague ?
Guillaume Ortis: Le staff et les joueurs sont arrivés à Prague, le mercredi 2 novembre, deux jours avant le début de la compétition pour que tout le monde puisse passer une journée “off” le jeudi et être en forme pour le vendredi, début de la compétition.
Nous avons séjourné dans un hôtel différent de celui qui avait été proposé aux délégations étrangères.
Nous étions dans notre bulle.
“Ce sont des journées très chargées
qui demandent énormément de concentration
et prennent beaucoup d’énergie,
même si nous ne sommes pas sur le terrain
en tant que joueur.”
Comment étaient organisées vos journées ?
G.O.: Nos journées ont été intenses, et nous suivions le programme établi par les organisateurs des championnats du monde. Il y avait peu de répit, le programme était millimétré à la perfection et nous avons su utiliser au maximum nos temps de repos.
Comment avez-vous travaillé pendant ce tournoi ?
G.O.: Depuis 2016, Jimmy est mon adjoint et a le rôle de sélectionneur en simple, c’est donc lui qui gère toute cette partie pendant les compétitions ainsi que sur les stages de préparation.
Je ne me désintéresse pas de la préparation et de la performance des joueurs français en simple ou du joueur qui joue pour l’équipe de France, mais cela me permet de me concentrer sur le double et sur le triple.
Et c’est vraiment quelque chose de très important car j’ai besoin moi aussi de pouvoir garder de l’énergie surtout lorsque l’équipe de France est en compétition.
Ce sont des journées très chargées qui demandent énormément de concentration et prennent beaucoup d’énergie, même si nous ne sommes pas sur le terrain en tant que joueur.
Avec Jimmy, nous échangeons beaucoup avant et pendant les compétitions.
Qu’a apporté la présence des membres de la FFF à Prague ?
Jimmy Libert : Cela fait plusieurs mois que des contacts avec des membres de la FFF sont établis et qu’ils viennent nous voir sur les différents stages et rassemblements, mais c’était la première fois sur une compétition officielle internationale. Je pense que cette présence donne encore plus de crédibilité, de légitimité à la pratique du Futnet.
La FFF nous offre également plus de visibilité, à travers les images, la communication, les réseaux qui sensibilisent davantage de monde.
Michaël Langot et Emilie Trimoreau* étaient en tribunes avec un rôle d’observation qui s’est vite transformé en rôle de supporter inconditionnel dans le kop français présent. Ils étaient avec nous nous dans la vie de groupe à l’hôtel et pour les repas.
Nous avons eu de nombreux échanges sur le Futnet, la compétition, les résultats, les joueurs, … Ils se sont fondus dans groupe avec toute leur gentillesse comme s’ils étaient là depuis longtemps.
Guillaume Bigot*, caméraman des bleus de Didier Deschamps, nous a suivi en immersion pendant 6 jours avec sa caméra. Il nous a offert un reportage de cette aventure qui nous laisse à tous un magnifique souvenir…
Mais je dirais qu’il nous a également donné une force et une confiance supplémentaire, peut-être qu’une petite touche bleue championne du monde était en nous sans le savoir ? … On a adoré tous ces échanges avec lui, 1 mois après Prague il partait à la Coupe du Monde au Qatar et filmait M’Bappé comme Maxence Vernier (Rires).
“William, Jérémy et Vincent
ont réalisé la compétition parfaite.
Celle de leur vie ?
Ça, peut-être qu’il se le diront
dans plusieurs années quand
ils auront arrêté !”
Comment avez-vous vécu ces mondiaux ?
G.O. : Ils ont été extraordinaires !
Sur le terrain, sur le banc, mais aussi dans les tribunes avec la présence de nombreux supporters français qui avaient fait le déplacement, il y avait aussi des milliers de spectateurs dans la magnifique enceinte sportive de l’O2 Universum Arena.
Mais pendant la compétition, tout le monde était concentré. Les joueurs faisaient le job sur le terrain et le staff en dehors.
Me concernant il y avait un peu de stress avant la compétition avec la peur de mal faire, malgré des journées longues et des nuits courtes, les bonnes performances m’ont permis de profiter de bons moments et d’enchaîner les trois jours de compétitions avec sérénité.
Nous avions préparé comme jamais ces championnats du monde avec de nombreux stages, avant de partir à Prague, nous avions comme objectif de rentrer dans le dernier carré des trois disciplines.
On s’était dit que tout était possible…
J.L. : En simple, la 6ème place en simple laisse un petit goût d’amertume car entre la 1ère et la 7ème place il n’y avait pas une grosse différence de niveau entre les joueurs présents. C’est frustrant de se dire qu’en battant l’Irakien, l’Américain, le Roumain, et en n’ayant qu’une défaite au compteur contre le Tchèque double champion du monde en titre on ne peut pas atteindre le carré final.
En double, que dire !
Pour ceux qui connaissent le Futnet depuis longtemps, la domination tchèque et slovaque est telle que remporter un titre de champion du monde en double et triple parait irréalisable. N’ayons pas peur des mots : il s’agit de la plus grande surprise de l’histoire du Futnet !
Mais pour autant, cette victoire est méritée car le parcours est parfait avec des victoires contre la Suisse, La Roumanie, la Hongrie et la Slovaquie par deux fois. William, Jérémy et Vincent ont réalisé la compétition parfaite. Celle de leur vie ? Ça, peut-être qu’il se le diront dans plusieurs années quand ils auront arrêté !
En triple, la performance du triple est remarquable, il faut tout de même se dire qu’il s’agit de la deuxième médaille dans la discipline du triple sur les 25 dernières années, c’est dire la performance réalisée par ces 5 joueurs à Prague.
Ils ont été solides sur les matchs de poule qu’il fallait absolument gagner, je pense notamment à la Corée et l’Irak. En demi-finale contre la Slovaquie, la marche était malheureusement trop haute pour nous…
Puis pour le match pour la 3ème place dans un contexte d’euphorie quelques minutes après la victoire du double, les joueurs ont su se remobiliser et réaliser la performance qu’il fallait, quand il le fallait face au triple hongrois.
G.O. : En triple nous réalisons la même performance qu’en 2016 avec cette médaille de bronze et les joueurs méritent ce podium. Cela n’a pas toujours été simple, notamment contre l’Irak, car nous aurions pu perdre toute illusion de médaille, mais le mélange de jeunesse et d’expérience avec Julien Mercier, William Rambaud, Maxence Vernier, Matteu Caviglioli et Maël Delanous, nous a permis d’être au niveau pendant trois jours et de monter sur le podium.
Comment étaient vos relations avec les joueurs ?
G.O. : Depuis de nombreuses années, nous essayons de composer un groupe avec les meilleurs joueurs français, tout en privilégiant le vivre ensemble.
Nous sommes proches des joueurs mais de temps en temps Jimmy et moi nous nous effaçons un peu de la vie de groupe pour nous concentrer sur nos objectifs, mais aussi pour laisser les joueurs passer du temps ensemble, sans forcément avoir les sélectionneurs sur le dos.
Mais attention nous ne sommes jamais trop loin !
J.L. : Le groupe se connaît parfaitement bien depuis de nombreuses années, s’apprécie et vit très bien ensemble au quotidien. Les 6 jours passés à Prague ont été magnifiques aussi bien sur et en dehors du terrain. C’est aussi un élément de la réussite sportive.
Le staff -avec Bruno Anquetil (Manager), Cyril Vallet (Préparateur physique), Gaëtan Brillet (Kinésiologue), Alexandre Legay (kinésithérapeute), Guillaume Ortis (Sélectionneur) et moi, son adjoint- est stable, lui aussi, depuis plusieurs années, les rôles sont bien répartis pour essayer de mettre les joueurs dans les meilleures dispositions possibles et leur permettre de s’exprimer au mieux.
C’est tout un groupe qui a vécu une magnifique aventure commune à Prague, sans oublier évidemment ce kop venu de France qui n’a cessé de donner de la voix et nous supporter pendant 3 jours, pour nous apporter une force supplémentaire, de même que ceux restés en France grâce aux nombreux messages.
G.O. : Je tiens à souligner également, le travail du staff notamment d’Alex notre kiné qui a su garder les joueurs au top pendant ces trois jours de compétition,
Cyril, notre préparateur physique n’a pas pu venir avec nous à Prague, mais il était présent sur nos stages de préparation et son travail a porté ses fruits ;
Ainsi que Bruno, notre intendant qui avait préparé en amont ce séjour à Prague, mais aussi tout le travail qu’il a effectué pendant la compétition pour qu’on puisse garder nos esprits tournés vers la performance.
Et un petit clin d’œil à Gaëtan, notre Kinesiologue qui n’était pas là lui non plus à Prague mais je tiens à le remercier pour son travail.
Jimmy, on t’a vu fêter le titre avec les joueurs et le staff comme si tu avais joué…
Évidemment ! Les joueurs nous ont fait vivre une émotion incroyable et quel privilège de vivre ça au plus près d’eux.
Merci pour ces émotions !
Après le match de double, j’étais ému car j’ai connu le Futnet Français jouer les seconds rôles sur les compétitions mondiales, avoir du mal à se développer et le voir ainsi triompher, c’est une récompense pour tous les joueurs et anciens joueurs depuis des années, mais aussi pour tous les dirigeants qui se sont battus depuis 25 ans pour que ce sport existe en France.
J’étais tout simplement heureux pour des amis, je le suis toujours d’ailleurs…Pour la petite histoire, j’ai joué en double en équipe de France avec Vincent, Jérémy, et William !
La longévité de ces joueurs au plus haut niveau et leur persévérance qui se voit ainsi récompensée de la plus belle des manières.
Le mot de la fin…
G.O. : Depuis plusieurs mois, nous surfons sur une vague positive, tout d’abord, depuis le mois d’avril, nous avons rejoint la Fédération Française de Football qui nous a accueilli au sein de ses nouvelles pratiques, puis notre récente performance aux championnats du monde nous laisse espérer des jours encore plus beaux que ce soit en terme de développement, mais aussi avec une équipe de France qui va probablement vivre de beaux moments dans les années à venir, tout en gardant à l’esprit qu’il va falloir rester concentré et travailler toujours et encore pour rester parmi les meilleurs mondiaux.
J.L. : L’ambition sera de maintenir ce niveau de performance, ou du moins garder ce niveau d’exigence et d’ambition. Les résultats vont naturellement donner beaucoup de confiance au groupe, mais il ne faut pas s’endormir là-dessus car il sera difficile de reproduire de tels résultats.
Restons humbles, travaillons et soyons toujours ambitieux. Le triple a gagné une belle médaille de bronze, mais on était loin du niveau des finalistes. Lors du prochain tournoi International de l’Esterel Futnet Cup en juillet à Saint-Raphaël**, on essaiera de rivaliser au mieux avec ces Nations.
Il faudra également travailler sur le renouvellement d’un groupe dont la moyenne d’âge était élevée à Prague, le rajeunir, l’ouvrir à des joueurs qui se mettent en valeur dans le championnat et essayer de dénicher de jeunes talents pour les accompagner pour les années à venir.
Seule la performance sur le terrain importe, pas l’année de naissance inscrite sur un papier.
* Emilie Trimoreau : ancienne joueuse de football professionnelle. Elle est actuellement Chef de projet Développement et animation des pratiques FFF.
Michaël Langot : Chef de projet Déploiement des nouvelles pratiques FFF et notamment du Futnet.
Guillaume Bigot : Journaliste Reporter d’Images pour la FFF. C’est à lui que l’on doit la majorité des images diffusées des joueurs de l’équipe de France de football durant le mondial au Qatar.
** L’Esterel Futnet Cup, pour sa troisième édition, se déroulera à Saint-Raphaël sur la Place Coullet du 15 au 17 juillet 2023.
Bravo pour se reportage et a bientôt